1- Participation

La participation à ce séminaire  est chaque année impressionnante, soit environ 70 personnes en moyenne, effectuant soit le stage complet, ou le stage partiel, mais  généralement par journées complètes. Un réel engouement existe, attesté par la participation massive de quasiment tous les élèves de Paolo MAGAGNATO,  qu’ils  soient de Milan, de Florence, de Sardaigne ou d’autres régions d’Italie.  Cet  engouement  me semble du à la fois au sérieux que déploie Paolo pour sa transmission, le rapport humain qu’il entretient avec son auditoire, la quantité et la qualité de sa communication pour de tels événements. Cet engouement me semble aussi du à l’extrême gentillesse des deux Maitres taïwanais, qui déploient pour toutes et tous, des trésors d’attention pédagogiques, qui connaissent et reconnaissent chacun ou chacune, qui ont un mot ou une attention, un sourire, une poignée de mains pour tous pour chacun de celles et de ceux qui viennent à eux. Il est enfin, incontestablement sous tendu par le véritable trésor que représente  la transmission des disciplines de l’école Cheng Ming.  La  délégation suisse a envoyé quelques personnes ; les français, en progrès cette année, sont au nombre de sept, avec Jennifer, Patrick Abiven, Cecile et Christine, Olivier, seul enseignant,  Frédéric du groupe de ST Genis, et le signataire. Notre groupe est fort bien accueilli, chacun d’entre nous étant gracieusement  hébergé chez l’un ou l’autre élève italien. Cette année, un pont bienvenu séparant un jeudi du week end du stage, je suis parti en avance sur les autres, afin de profiter de quatre jours de cours et de stage. J’en ai retenu les enseignements suivants :

2- Thèmes abordés.

A –Etude du Qi gong nei gong yang sheng.

Maitre Wang Fu lai insiste sur le fait que l’étude du qi qong permet à l’énergie, le chi, de demeurer à l’intérieur du corps, et que l’étude du nei gong permet d’acquérir les outils pour la faire sortir, par exemple, dans le cas d’une application martiale.

La sensation corporelle de globalité doit se matérialiser  selon les critères unifiés  « di », ou base du corps  (terre), « ren », tout le corps  (homme) et tian Ying, ou (ciel).

Etude des 8 « dans lian «(en japonais , kihon)   qui découlent tout autant du qi gong, que du tai chi, que de toutes les autres disciplines de l’école Cheng Ming. Il S ‘agit en fait d’exercices dynamique de sortie de force, s’apparentant, selon  moi au fa li (explosion de force ) du Da Cheng chuan ,  reprenant certaines des techniques incluses dans la tai chi des synthèses. Elles doivent s’effectuer d’un côté, puis de l’autre, selon trois types de déplacement différents : sur place, sur un demi pas, puis sur un pas glissé complet. Maitre Huang Su Chun me précise que la première série de dan lian que je connais,  pratique et enseigne, ne constitue qu’une infime part de tous ceux existant, par ailleurs au sein de l’école : nous avons  donc encore beaucoup à apprendre !! Les huit premiers  se nomment, selon les précisions de Maitre Wang Fu lai :

  1. Suai so : frapper en supination main dirigé vers le bas
  2. Tan : bras montant recourbé.
  3. Pi : dégagement de saisie sur la hanche, frappe en retour avec la paume.
  4. Ji, mains serrées, presser vers l’avant
  5. Tou, pique de la main opposée à la jambe avancée.
  6. Suang  an, tirer la que de l’oiseau, phase quatre et cinq
  7. Lu ji, idem phases – trois –quatre
  8. Suan tan, double dégagement de saisie à la gorge en frappant les genoux, à but également thérapeutique.

B Etude du Ba gua zhang (-Pakua  chuan )

Cette pratique, abordée lors de deux des sept entrainements que je suivrai lors de ce séjour, me semble de loin parmi les plus  complexes au point de vue forme qu’il m’a été donné de découvrir depuis  que je pratique les arts martiaux  .La difficulté majeure à laquelle je me trouve confronté réside dans le fait que le déplacement, en constant pas tournant, comporte de nombreux et complexes changements de directions, de variations de paumes, de flexions, d’écrasement, d’esquives de buste  qui nécessitent, de la part de l’apprenant, un immense effort d’attention, de mémoire, de disponibilité, de compréhension  .  Il s’agit en fait de bien visualiser ce que nous sommes sensés reproduire dans l’autre sens, puis à l’envers. Pour mémoire, l’étude du Pakua  traditionnel, selon l’école Cheng Ming, laquelle se réclame de la plus  grande authenticité en la matière, se résume à huit (ba) enchainements, le premier , Ba mu zhang, constituant l’exercice mère de base,  déjà étudié avec Paolo, et sept autres comme suit :

1-Ba mu zhang , sur place, en ligne ou en cercle, en bonne voie d’assimilation à Atemi.

2- Dan cao :  8 techniques sur place avec changements  de paume , de plus  en plus  élaborées.

3 –Lian huang zhan,  qui reprend en fait les principes techniques statiques de Dan cao, mais selon un double déplacement circulaire, chacune des huit techniques s’effectuant en marche bakua circulaire, dans un sens, puis dans l’autre . Nous avions, lors du dernier stage en France sous la direction de Paolo, abordé l’étude de cet enchainement en l’attaquant avec ses deux premières techniques effectuées selon un déplacement linéaire simple, qui nous avait déjà paru, à tous, complexe . Mes difficultés ont été telles lors de ce stage à Milan pour retenir la forme, et le bon ordre des déplacements, qu’il ne m’en est tout simplement rien resté, ce dont j’avoue avoir quelque peu honte. J’ai tenté de reprendre le livre des Paumes de l’école Cheng Ming en anglais, en ma possession, illustré avec  les photos et les commentaires de l’expert l’américain  que n’aime semble t-il pas  maitre Wang Fu Lai, mais sans plus de succès, tant j’ai déjà des difficultés à retenir et intégrer la phase deux de Dan cao, pourtant largement abordée lors de mon tout premier stage Cheng Ming en …2009. J’espère que nous les ré -aborderons lors du prochain stage en France, car j’entrevoie là une masse considérable de travail à intégrer.

4-You zhen  zhang, autre forme plus complexe

5- Ban huan  zhang, autre forme encore plus complexe

6- 7 -et 8, trois autres formes avec armes, entre épée, bâton long  (différent de celui du Xing yi chuan) .

Des propos de nos deux maitres toujours disponibles pour aider et faire avancer le débat, je retiens que le principe de base du Bakua, selon le pas tournant , consiste à essayer de passer dans le dos de l’adversaire .  Le pas tournant génère, au début de sa pratique, une forme de déséquilibre , qui s’efface petit à petit grâce à une longue pratique, par exemple celle  des milles pas lors de la même séance  . Le tournis  constitue un des écueils que le temps nous aide à surmonter, grâce au travail de la verticalité  et de la respiration profonde, issue de la pratique sur le long terme de la posture. Les pas, l’un droit, l’autre circulaire, succession d’éléments  Ying et yang, sollicitent les méridiens et confèrent à cette pratique du pakua une dimension thérapeutique reconnue. Les applications martiales sont envisageables dans le courant du pas, et lors du changement de direction ; Le regard doit au début demeurer devant soi afin de ne pas altérer notre équilibre ; il pourra être port vers le centre seulement après  une longue période d’entrainement. Ces éléments disparates  ont été notés en vue ultérieure  de l’intégration correcte de ces formes, qu’il faudra sans doute des années pour assimiler . J’espère qu’il y aura, parmi les élèves les plus avancés d’Atemi, un ou deux passionnés, qui voudront bien s’investir et se spécialiser dans ces formes. Il m’apparait en tout  cas difficile d’assimiler correctement et même temps toutes les riches formes de Cheng Ming, et de devoir, de surcroit, pratiquer quotidiennement la posture dans le cadre de notre étude du Da Cheng, parallèle et complémentaire

c-Etude du xing yi chuan ( boxe de l’intention).

Comme vous le savez sans doute, le xing yi chuan, boxe du cœur et de l’intention, essentiellement pratiquée d’une manière linéaire, ne comporte pas seulement l’étude des cinq éléments, à la quelle nous nous adonnons depuis deux ans lors des cours du mardi et du jeudi, et que nous trouvons de plus en plus complexe au fur et à mesure que nous croyons avancer. Il existe aussi la série des douze animaux, et plusieurs enchainements, ( tao ), qui mixent éléments et animaux, le tout sous tendu par l’incontournable notion de nei gong . Il existe enfin quelques enchainements avec des armes, dont plusieurs de bâton long, que nous pratiquerons abondamment lors de ce stage de Milan , ce qui ne sera pas sans me rappeler mon approche du bô, ou  bâton long japonais , lors de mon long séjour au sein de l’école de karaté Shotokai de 1973 à 1984.

Nous laissons cette fois ci les cinq éléments de côté ; les plus anciens sont pilotés pat le Maitre, avec l’étude du bâton court du Xing yi, que je me promets d’aborder ultérieurement. Tout le reste du groupe, dont les 7 français, se rangent sous la direction de La Maitre, sifu Huang Su Chun, afin de détailler, pendant prés de trois  heures, l’étude des 7 premiers animaux, soit, le tigre, le cheval ; la frégate, l’ours, l’aigle, le serpent, et un survol du crocodile . Ces techniques me semblent, au niveau de la forme, élaborées  d’une manière extrêmement constructive pour sortir une énergie de  bon aloi, répartie  sur autant de formes coups frappés divers, poings, paumes, coudes, ou selon des poussées,  des tirées, agrippages, piqués, renversements, écrasements,  saisies, décalage, clé, préhensions, soumission, etc. Elles me semblent  toutefois comporter l’inconvénient selon lesquels l’exactitude leur exécution technique  semble trop attachée à une forme au détriment de la  réalité de la rue, ce qui n’est pas me rappeler les katas des diverse écoles  de karate que j’ai fréquenté. Cette lourde matinée de travail me replonge plus précisément en 1986, lorsque, débutant au sein de l’école Shaolin Mon de Kenji Tokitsu , nous ne rations pas, sous la direction de notre jeune prof Thierry Bailly,  un seul cours sans exécuter quelques allers retours des deux premiers animaux, mais sans jamais en détailler les possibles applicatifs, ce que nous fîmes abondamment lors de ce stage de Milan. Il me semble comprendre que ces techniques  bien qu’abordées linéairement, ne sont pas faites pour le combat libre conventionnel, mais plutôt pour l’auto défense spontanée. J’attends , avant de me lancer dans la transmission de ces techniques, de les avoir moi-même  correctement assimilé, ce dont je suis loin, mais aussi que la majorité de mes élèves aient correctement intégré la première série, plus aisée, propre au Wu Xing chuan, (cinq éléments ). Un outil didactique, livre ou mieux, vidéo, relatifs à ces animaux manque cruellement : il est difficile de devoir transmettre sans être en mesure de s’auto corriger selon un référentiel mère, surtout lorsqu’une grande précision gestuelle est requise, afin que le corps ait la bonne attitude, celle porteuse du fond « nei gong «  adéquat!!!

Nous abordons ensuite l’étude du bâton  long du xing yi chuan.  IL s’agit pour moi d’une découverte enthousiasmante, dans la mesure ou le bâton bouge facilement au creux des paumes,  s’il est bien porté par la  statique habituelle, assortie d’une détente, de disponibilité , et de cohésion entre corps et esprit, haut et bas du corps, exactement comme lors de l’exécution des techniques à mains nues , qu’elles soient issues du tai chi, du pakua, ou du xing yi . Le bâton long du Xing Yi chuan mesure environ 180 cm, selon :  il doit monter, une fois  posé verticalement à terre,  affleurer entre les yeux de l’exécutant ; il est fait de rotin souple, se révèle très  maniable, mais très  percutant lors des impacts ; il s’agit, pour celle ou celui sait bien la manier, d’une arme redoutable  .J’en ai soigneusement noté les différents techniques ,de la première à la dernière ; je tiens mes notes manuscrites à disposition de celles ou ceux qui les solliciteront ; en tout état de cause, ceux-ci se rendront vite compte qu’elles sont carrément inexploitables ; je suis moi même incapable , bien qu’ayant plus que sérieusement bossé et retenu cet enchainement, d’en mémoriser la teneur exacte,  surtout sur les coups frappés des pas de xing yi, propre à cette discipline . Je sais que l’enchainement se répète deux fois à l’identique après être tourné à 360 0 .  Je suis à peu prés en mesure d’en transmettre les 10 premières techniques, pour peu que mes élève veuillent bien s’équiper  du matériel nécessaire,  ce que six mois après, je ne suis pas parvenu à obtenir. J’ai décidé de parfaire cette étude lors du prochains stage estival de Toscane  .Là, je déciderai si j’introduis ou pas en atelier spécialisé, cette arme, sachant que son étude ne  peut raisonnablement s’envisager dans notre petite salle , trop basse de plafond, hérissée de néons …!!

d- Etude du tai chi chuan des synthèses authentiques.

Lors de l’entrainement du samedi matin, et aussi celui du dimanche après midi, nous abordons, en deux groupes, l’étude du tai chi des synthèses ; les plus avancé se placent sous la direction du Maitre Wang Fu Lai, les autres sous la férule de La Maitre Huang su Chun. Les premiers exécutent plusieurs fois l’enchainement en entier, l’autre groupe se contentant de la première partie, avec la première et seconde section. Le cours de l’après midi est davantage destiné à découvrir ou perfectionner les applications martiales des séquences de la cinquième et sixième section. Olivier, Frederic et moi  rejoignons ce groupe, en compagnie de  Jennifer, audacieuse ; les autres français  , demeurant dans le groupe débutant.  Je constate avec plaisir que mes élèves suivent bien ; Olivier déploie une application remarquablement, Fred parvient à suivre bien que n’ayant jamais pratiqué ni la fin de la 4e, ni la 5e et surtout la 6; Jennifer, du haut de son année de pratique, s’en sort remarquablement. Maitre Wang exécute plusieurs fois l’enchainement d’un bout à l’autre, soit environ une demi heure chaque fois  changeant son positionnement  lors de chaque recommencement, s’attelant à pratiquer lentement, insistant, du geste et de la voix sur certaines difficultés posturales ou techniques inhérentes à tel ou tel  passage. Je trouve la fin de la sixièmes section assez différente de ce qu’en avait  fait Kenji Tokitsu , et m’efforce de soigneusement l’intégrer, puisque j’en ai placé son étude au programme du cours ancien du mardi soir, ce dès la rentrée.  Je constate, en regardant travailler Paolo et certains de  ces élève parmi les  plus avancés, que la rectitude de leur position est encore plus nette que celle que celle  que je m’efforce de changer  en moi, que les gestes de bras sont encore plus amples  que ce que j’avais observé,  plus ouverts, rappelant  les huit séquences du Ba mu Zhang du Bakua , que la position de base est plus base que je ne  peux maintenant la pratiquer .  J’observe, en fin de stage, que la surface sur laquelle nous avons pratiqué me fatigue beaucoup plus vite hanches et genoux que dans notre petite  salle, ou celle en plancher suspendu  de la MJC de Neuville, ou j’officie depuis 20 ans.

Les formes de Cheng Ming, Bakua, Xing yi ou le Tai chi, quelque soit celle des formes que nous pratiquons,  Yang, Chen, Zheng Zong , parmi celles que j’ai étudié, ou d’autres , doit constituer une  œuvre personnelle malléable permanente, comme le sculpteur avec ce qu’il a tiré de son bloc de glaise , œuvre que nous croyons avoir enfin façonné de la plus belle des façon, mais qu’il convient, sans regret, et sans hésitation, de fracasser, remettre en boule, afin de remettre la  glaise sur l’établi, faire, défaire, refaire inlassablement, jusqu’à ce que jaillisse en nous cet magnifique sensation de plénitude globale, propre aux arts martiaux internes, plénitude dont je ne vois  pas , ni ne connais  les  limites ; ou en suis-je ? Ou peut encore m’emmener le temps  de  pratique qui me reste ? Je l’ignore ; tout ce dont je  suis sur, c’est que je désire, encore et toujours, aller de l’avant, si les articulations et le sol auquel elles sont sans cesse soumises, me le permet aussi longtemps, que mon mental le souhaite.

3- Réflexions personnelles

Ces stages sont autant instructifs qu’enrichissants, car ils ouvrent à Atemi un champ de nouveautés et de progression quasi infini ;  ils sont par ailleurs hautement compatibles et complémentaires avec  ceux suivis en Da Cheng Chuan  avec le couple Ribert. L es différentes disciplines, à main nues ou avec armes de l’école Cheng Ming constituent une véritable mine d’information, assorti d’un état d’esprit et d’une recherche comportementale qui convient maintenant à tous les adhérents d’Atemi. Je me félicite donc d’avoir franchi ce pas, de l’avoir officialisé, en passant le Bai shi à Taiwan, puis en devenant le représentant Cheng Ming  en France. Le coté négatif de cette perspective est que l’éloignement de Paolo, relatif par rapport à celui de nos maitres Taïwanais, ne me permet pas  pour diverses raisons, dont la dimension financière, de rendre visite aussi souvent qu’il le  faudrait à Paolo lors de ses stages de fin de semaine, pour mieux étudier, découvrir et progresser. Je reconnais également que l’âge avançant, je n’ai plus toute la capacité de récupération et la condition articulaire nécessaire pour enchainer voyages, stages lourds, entrainements personnels, cours et ateliers.  Le temps est venu ou  je souhaiterai que l’étude des diverses disciplines de Cheng ming, variées et profondes, soient intelligemment réparties au sein d’Atemi, entre ceux des anciens décidés à prendre leur pratique en main selon leurs aspirations et préférences, pour continuer avancer et à évoluer, et à leur tour, transmettre.

ST Germain au Mont d’or, novembre 2013

Jean- claude Guillot


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