D’après certains textes bouddhistes au cœur desquels il m’arrive, non sans difficultés de m’aventurer, je crois comprendre que nos vies sont toutes soumises à cinq émotions dites conflictuelles et perturbatrices, qu’il convient d’essayer de combattre de peur qu’elles ne gâchent notre trop bref passage sur terre. Certaines pratiques peuvent ainsi nous amener à substituer certaines sagesses à ces émotions. Il s’avère probable que la pratique de la posture de base sur deux appuis fut conçue en tant que pratique spirituelle avant de servir de substrat à l’art martial interne.
Cette pratique, que j’ai découvert par le biais de cet applicatif en 1986, nous amène à prendre conscience de l’impermanence de choses. De la relativité de nos pulsions et de nos frêles convictions, de la futilité de nos états d’âme au regard de l’histoire de l’humanité dont nous ne sommes que de misérables traits d ‘union éphémères et filants comme des étoiles que nous nous efforçons de devenir, mais que nous ne serons jamais. De par notre trop de comportements erratiques.
Dans un objectif d’auto protection. ll convient, lors de l’exécution de ces longues plages de posture de l’arbre, de s’imprégner de la parenthèse temporelle à laquelle elle nous permet d’accéder, qui nous maintient dans un « ici et maintenant* » ramenant le futile fuyard qu’est notre esprit de ses chroniques incursions dans un passé entreposé dépassé, ou un futur spéculatif anticipé. Cette dimension s’affirmait d’ailleurs chez les philosophes latins avec leur « hic et nunc »*, ou chez des philosophes comme Durkheim avec la recherche de l’immanent « moi intérieur ».
Ne passons nous pas ainsi à consumer nos vies à nous accrocher à des choses illusoires que nous voulons permanentes ? Voyons- nous les choses et les gens de la manière pure dont nous devrions éduquer notre esprit à les voir ? Que voyons-nous quand nous regardons une rose ? Voyons- nous tous la même chose ? Voyons nous d’abord ses épines, nous focalisons nous sur son odeur sa couleur, sa beauté ? Mais voyons- nous à travers la permanence de nos filtres sociétaux résolument orientés et la dualité de nos interprétations ce qui caractérise l’essence même de la rose ? Ne devons nous ainsi pas tendre à ne jamais être séparés du réel par des mots, des idées, des opinions, des croyances petit à petit conceptualisés, ceux teintés par notre égo, en fin de compte si faibles ?
Ces cinq émotions conflictuelles et perturbatrices, spontanées et éruptives, d’une manière ou d’une autre universellement évoquées par toutes les confessions, constituent l’exsurgence d’une négative alchimie, si leur énergie n’est pas résorbée à temps.
S’il fallait les hiérarchiser, l’ignorance constituerait la plus pesante d’entre elles. J’entends par ignorance non pas le manque de cognition, de culture ou d’instruction, mais plutôt l’ignorance de nos propres tares, de nos déficits comportementaux de tous ordres dont nous inondons chaque jour notre entourage, tout en ayant l’impression d’être parfaits. La quête de la sagesse propre à l’espace s’oppose à ce défaut, sagesse selon laquelle l’espace conféré par tous les êtres et toutes les choses
doit être pris en considération afin d’aboutir à des décisions et engagements comportementaux autant que faire se peut objectifs. Et surtout consensuels.
L’orgueil vient ensuite, qui nous inonde tous plus ou moins, de sa suffisance nous amenant à insidieusement nous placer en toutes circonstances et pour toutes choses au dessus des autres, doit être combattu par la sagesse de l’équanimité. Celle qui consiste, dans notre fore intérieur, à spontanément donner le même crédit à chacun et à chacune, femme ou homme, enfant ou adulte, jeune ou vieux, beau ou laid, cultivé ou pas, blanc ou noir, de gauche comme de droite ? Ce sans passer arbitrairement qui que cela soit au crible de notre propre référentiel.
Le désir et l’attachement, pourtant bien humains et souvent si romantiques, doivent nous amener, grâce à la sagesse discriminante, à apprendre à mesurer l’’impact des effets potentiellement et objectivement négatifs au sein de toutes situations. Les mots alors employés recélant ainsi un impact sémantique différemment perçu selon la culture, la provenance familiale, le parcours conditionnant la capacité de chacun à dominer cette émotion.
La jalousie, cet acide antagonisme persistant envers ceux qui possèdent ce ou ceux que l’on n’a pas et que l’on voudrait, doit être combattu garce à la sagesse dite ‘toute accomplissante » celle qui doit aboutir à une considération agoniste consistant à accepter que d’autres peuvent avoir, ont, ou vont avoir des revenus, ou déployer des qualités, ou bénéficier de la part de tierces personnes, des biens, des valeurs, des sentiments que l’on brigue pour soi même, dont on rêve d’avoir la primeur.
La colère, qui nous submerge, qui nous affaiblit, qui révèle nos piètres limites, doit, elle, être combattue par la sagesse dite semblable au miroir, celle qui nous reflète notre veule image, celle de notre ire , mais qui a ceci d’intéressant qu’elle reflète la pureté de notre émotion.
Or, dans ces cinq cas de figure, nous devons parvenir, suite à ce vide temporel s’étant installé en nous grâce au travail de la posture mentale, à capter la prime pureté de ces émotions pour les « alchimiser « en sagesse correspondante, avant que ne nous investissent nos idées ancrées, nos poncifs, nos postures mentales, sociales, mondaines, sociétales, en tout cas empreintes de nos apriori . Nous devrions tendre à ne plus être séparé du réel par les mots, par les images, comme celles d’un passé qui nous fit tant de fois souffrir, ou d’un futur que nous bâtissons de toute pièce, qui nous savons pourtant qu’il ne ressemblera en rien à celui auquel nous escomptions quand viendra le temps de le vivre..dans la vraie vie.
JC Guillot
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